ENLUMINURES


Sujets divers profanes - L'Amour Fou ou le Cercle Vicieux

L'Amour fou ou le cercle vicieux, enluminure originale de Pierrick Pinot L'Amour fou ou le cercle vicieux, enluminure originale de Pierrick Pinot L'Amour fou ou le cercle vicieux, enluminure originale de Pierrick Pinot L'Amour fou ou le cercle vicieux, enluminure originale de Pierrick Pinot

Taille réelle : 990/190 © 1983. Tous droits de reproduction et d'adaptation réservés pour tous pays.

Description de l'allégorie.

La structure du dessin repose sur le symbolisme de la Croix. Ainsi, tous les personnages qui composent cette danse se meuvent dans le sens horizontal, de part et d'autre d'une enfilade de douze colonnes, tandis que l'arbre au milieu de la composition et au pied duquel est assis un Fou, croît suivant le sens vertical. L'horizontale est le plan spatial et temporel terrestre où se déploient les actions, les pensées et les sentiments humains qui oscillent et sont sans cesse « tiraillés » entre deux pôles, l'un étant lumineux et l'autre ténébreux. Le dessin peut donc être lu de gauche à droite, du Soleil vers la Lune et de droite à gauche, de la Lune vers le Soleil. Cependant, quoiqu'il arrive, toutes choses se meuvent inéluctablement vers leur fin. Aucune puissance humaine ne peut vaincre et arrêter ce mouvement perpétuel. C'est pourquoi les deux « gueules » situées au début et à la fin de la danse qui semble jaillir de l'une pour s'abîmer dans l'autre, se rejoignent en réalité, pour former une boucle, un « cercle vicieux » desquels il est impossible de s'affranchir si l'on ne compte que sur les seules ressources individuelles. Le Fou, qui en occupe le centre, sait bien cela et puise à la divine Sagesse symbolisée par le livre ouvert devant lui. Là, il peut espérer échapper à ce cycle par la connaissance du Soi et de l'Amour divins, dont les 3 fleurs « supraterrestres » s'épanouissent au sommet de l'Arbre de Vie, aux couleurs traditionnelles des trois vertus théologales de la Foi (blanc), de l'Espérance (vert) et de la Charité ou Amour (rouge). Installé dans l'éternel présent, il est entièrement dépendant des puissances spirituelles émanant de l'axe vertical. Ce sont elles qui le délivrent des vicissitudes du siècle et c'est de lui, qu'elles sourdent, jaillissent et irriguent ce monde...

LES PERSONNAGES DE LA COMPOSITION.

La jeune femme pudique, habillée de bleu et voilée, de dos, représente l'amour pur originel. Elle est protégée et gardée par un chien à trois têtes, prêt à éconduire, voire à dévorer l'Amant dont les intentions seraient "vicieuses", c'est-à-dire contraires aux vertus théologales.
L'Amant ou l'Amoureux, est littéralement «transporté» mais le désir de la posséder l'emporte dans l'autre sens et l'éloigne d'elle. Il tient pourtant dans sa main une branche verte, gage de vie éternelle.
Une femme habillée de vert, lascive attend l'Amant éconduit pour lui offrir les consolations du plaisir charnel qu'elle attise. C'est par dépit qu'il va tomber sous son influence et courir après une satisfaction qu'il ne trouvera jamais puisqu'il sera poussé sans cesse à la renouveler.
Une diablesse, insidieusement mêlée à la farandole donne le branle à la danse.
Un bateleur masqué, symbole de l'artiste-artisan dévoyé, ne perd pas le souvenir de cet amour vers lequel est tourné son regard, mais il est irrésistiblement entré dans la ronde, amené à pratiquer son art ou son métier non plus de façon désintéressée mais par cupidité. C'est un faiseur de tours... Par là, il est engagé sur la voie du trépas et de la douleur, évoqués par le squelette, symbole de la Mort.
Le Fou, immobile, montre du doigt les trois fleurs mentionnées plus haut. En fait, il n'est pas fou mais passe pour l'être aux yeux de ceux qui défilent devant lui sans le voir, trop occupés à leurs mondanités. La lumière de sa lanterne, celle du savoir et de la sciences profanes, est éteinte. La vraie Lumière brille dans son coeur, à l'insu de tous. L'arbre n'est sec qu'en apparence et pour les autres personnages seulement.
Un diable tache de séduire un pape, le tente et lui offre les attributs du pouvoir temporel en espérant faire de lui le plus sinistre des collaborateurs.
Le pape à tête d'âne fait allusion à la fable de La Fontaine, «L'âne portant des reliques» pour signifier que bien souvent, ceux qui sont sensés représenter, conserver et transmettre la spiritualité manquent à leur vocation en «trempant» malicieusement dans les affaires temporelles, inconscients du trésor qu'ils trahissent et dont ils sont pourtant dépositaires.
Un monarque, ivre de pouvoir arbitraire et de bonne chère va trébuchant, suivant une femme échevelée représentant l'injustice.
Un être au sexe indéfini souffle dans une trompette, produisant une musique « entraînante » et rentable. Elle ne donne rien à entendre et prend beaucoup...
Enfin, un homme à langue bifide, symbole du mensonge, chevauchant un pourceau, symbole de la sottise et de la bassesse, clôt la farandole, tout près d'être engloutie par la terre asséchée et enflammée. Au bout du compte, c'est le comble de l'ignorance qui, en tête, mène joyeusement ce beau monde insouciant à sa perte.
Au loin, on devine la silhouette d'une forteresse mise à sac, à feu et à sang : C'est le règne de la barbarie. Pour un temps seulement puisque la ronde doit recommencer, offrant chaque fois à ceux qui le veulent, c'est-à-dire aux Amoureux, l'occasion de s'identifier à certain Fou...

La morale de cette composition pourrait être : Tu as le droit de choisir entre la vie ("l'amour fou") et la mort (le "cercle vicieux") : Puisses-tu choisir la vie. (Deutéronome)

 
     


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